Dans une actualité de plus en plus monopolisée par la question des «conversions non éthiques», des organisations bouddhistes accentuent leur pression sur le gouvernement qu’elles somment de produire un texte de loi interdisant les conversions obtenues par des moyens frauduleux, sur le modèle de lois semblables récemment adoptées par différents Etats de l’Inde voisine. Au cours de manifestations menées dans les rues de Colombo dans les derniers jours du mois de janvier dernier, elles ont réclamé l’interdiction des ONG jugées par elles engagées dans des activités dirigées contre les bouddhistes.
Le National Bhikku Front (NBF), une importante association bouddhiste locale, a ainsi fait remettre à la présidente Chandrika Kumaratunga une lettre contenant le nom de trente-sept ONG accusées d’entretenir des liens avec des sectes chrétiennes soupçonnées de promouvoir la conversion au christianisme de Sri-Lankais bouddhistes ou hindous. Parmi ces sectes chrétiennes sont citées les noms des Assemblées de Dieu, de l’Eglise pentecôtiste et des Témoins de Jéhovah. Dans la liste des ONG se trouvent plusieurs importantes organisations internationales, pour la plupart impliquées dans des actions humanitaires et de développement, telles que World View International Foundation et Save the Children Fund. On trouve également des ONG locales, telle Sarvodaya, la plus importante ONG locale qui a été formée précisément pour promouvoir les concepts bouddhiques de compassion ou d’équanimité.
Selon le vénérable Ellawala Medananda Thera, président de Jathika Bhikku Sammelanaya (JBS), une autre importante association bouddhiste, l’incapacité du gouvernement à contrôler l’action de ces ONG a conduit à ce que les pauvres se retrouvent victimes de leurs agissements. «Il est impératif que les autorités identifient et interdisent toutes les ONG engagées dans des activités anti-bouddhistes», a-t-il déclaré.
Répondant à ces accusations, une porte-parole de Sarvodaya a répliqué que son organisation « avait vu les affiches l’accusant d’être impliquée dans des activités anti-bouddhistes mais, a-t-elle ajouté, «personne n’a eu le courage de venir nous voir et de nous dire précisément de quoi il s’agissait». Sarvodaya, a-t-elle encore argumenté, se consacre depuis trente ans au développement et se met au service «de toutes les communautés, quelle que soit leur race et leur religion».
A cela, le secrétaire du NBF a répondu : «Nous ne disons pas que Sarvodaya fait la promotion du christianisme. Mais la façon dont ils opèrent menace les racines même de la civilisation bouddhiste.» Il a aussi ajouté à l’adresse des autorités que, selon les dispositions prévues dans la Constitution, «le gouvernement était tenu de protéger le bouddhisme». L’article 3 de la Constitution, votée en 1972, stipule que le bouddhisme est religion d’Etat et que ce dernier a pour devoir de protéger et encourager le Buddha Sasana (clergé bouddhiste), tout en garantissant liberté et autonomie à toutes les autres religions.
Cet article est paru dans le N° 390 (1er février 2004) du bimensuel Eglises d’Asie, publié par les Missions Etrangères de Paris.
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